Auteures: Raquel et Pauline
Nous avons interviewé le syndic d’Yverdon, Pierre Dessemontet, pour lui poser quelques questions sur son parcours et les futurs projets d’Yverdon-les-Bains. Nous avons pu en apprendre davantage sur le métier de politicien ainsi que des informations et projets en cours dans notre ville. Voici la transcription de cet interview.
M. Dessemontet, lorsque vous étiez petit, vouliez-vous déjà devenir politicien ?
Non je ne dirais pas ça, ce n’est pas quelque chose qui m’est venu tout de suite. Quand j’étais petit, je faisais partie d’une famille où tout le monde faisait de la politique, donc mon père a été président du conseil communal à Payerne. Ensuite, nous avons ensuite déménagé à Crissier, et ma mère y a été municipale et députée et mon père était président du conseil. J’avais une famille où on discutait de politique à table. Mais à ce moment-là, je ne me voyais pas devenir syndic d’Yverdon.
Quelles études avez-vous fait pour devenir syndic ?
J’ai fait l’école obligatoire et ensuite je suis allé au gymnase en scientifique, maintenant appelé maths physiques et après ça, j’ai fait des études de géographie à l’université de Lausanne. J’ai donc travaillé en tant que géographe. Avec des camardes d’études, nous avons formé notre propre société. Et vers 40 ans, j’ai aussi fait une thèse à l’EPFL. Et j’ai toujours fait un peu de politique, mais en amateur, en étant conseiller communal à Lausanne vers 28 – 29 ans, et après je suis rentré au conseil communal à Yverdon. Et depuis 2016, je suis syndic d’Yverdon. J’ai aussi été élu au Grand Conseil.
D’où venez-vous ?
Alors, je suis né en 1969, à Payerne et j’ai déménagé à Crissier, où j’ai passé le reste de mon enfance. J’ai aussi vécu à Lausanne et quelques temps à Huston. Je suis ensuite revenu à Lausanne et depuis 2007 je vis à Yverdon.
Pouvez-vous nous décrire une de vos journées typiques ?
Oui, alors prenons par exemple une journée comme le lundi, une journée très régulière pour moi. Alors le rôle de syndic, surtout dans une ville comme Yverdon, ça se joue beaucoup dans la transaction. Je fais donc énormément de meetings. C’est un travail qui demande beaucoup de collaboration. Le lundi matin, je coordonne donc beaucoup. À 9h, je fais un meeting avec Carmen Tanner, la co-syndic. Ensuite, je vois le secrétariat général, donc l’administration générale de la ville. Puis je vois généralement le délégué à l’économie, qui fait partie des finances. Et souvent, une semaine sur deux, je vois le chef de services des finances. A midi, je mange avec mes collègues de l’alliance de gauche. Voilà une de mes journées typiques.
Entre les différents partis politiques, y a-t-il une bonne entente ?
Oui, ça va. On est obligés d’avoir une bonne entente, car on est bien sur concurrents mais aussi collaborateurs. On a une majorité de 5, les socialistes et de gauche contre 2 de droite. Mais bien sûr en 2026, nous serons obligés de nous confronter. Mais on a tous des ambitions différentes et il faut trouver une entente malgré l’avis de chacun.
Comment vous voyez-vous dans le futur ?
C’est une très bonne question. C’est un travail très prenant, et il y a beaucoup de choses à faire d’ici 2026, A ce moment-là, il y aura les élections et on verra ce qui se passera. J’ai de la peine à projeter pour après. Mais allons déjà jusqu’en 2026 ! Faire le mieux possible pour voir si je pourrais continuer en tant que syndic.
Avez-vous des passes- temps en dehors de votre travail ?
Et bien maintenant je n’ai plus trop le temps mais j’en avais. On est une famille qui aime notamment voyager. Alors on voyage le plus possible comme on peut. J’ai aussi fait de la musique. Je chantais dans un chœur, il y a 3 ans mais maintenant je n’ai plus le temps, mais je voudrais bien recommencer à chanter dans un chœur a cappella. Et je fais très rarement de l’astronomie en amateur.
Il a-t-il des projets ou initiatives en cours à Yverdon-les-Bains ?
Alors, je dirai qu’il y a beaucoup de projets notamment le projet du parking qui est toujours en cours. Nous avons aussi un plan de climat. On se confronte vraiment à la question de l’urgence climatique et comment on va la gérer. Vous êtes au collège des Rives et on a notamment la cour avec sa zone ombragée qui a été ratée. C’est typiquement un projet mis en place pour améliorer la cour des élèves.
Il y a-t-il des initiatives pour les jeunes ?
Alors, nous avons le conseil des jeunes, où les jeunes peuvent proposer des choses, et on essaye d’y trouver des solutions. Là on a un projet de faire un local pour les jeunes à la Marive par exemple. Mais toutes les initiatives sont bonnes à prendre.
En rapport avec le climat, avez-vous des idées pour la ville d’Yverdon ?
Alors oui, à Yverdon nous avons deux problèmes principaux : les îlots de chaleur avec des températures extrêmement élevées et le chauffage où nous essayons de sortir du gaz avec derrière la mobilité. Pour les îlots de chaleur, on a la stratégie de la végétalisation de la ville où on essaye de planter des essences qui résistent à la chaleur pour fournir un parasol et un peu d‘ombre. Par exemple sur le collège des Rives mais aussi sur le parc des Rives avec le gazon à ras qui chauffe à fond. Puis, on développe beaucoup le chauffage à distance à base renouvelable actuellement sur du bois renouvelable et on va développer de la géothermie pour pouvoir chauffer les bâtiments de la ville et sortir du gaz ce qui aura un grand impact sur la consommation de CO2. Avec la mobilité, il faut qu’on transitionne toutes les voitures à essence et motiver les gens à prendre moins la voiture, plus les transports publics. Il faut donc mettre en place ce qu’il faut pour que ce soit encourageant et d’autres part, pour ceux qui ont besoin d’une voiture, qu’ils utilisent une voiture électrique à la place d’une voiture à CO2. Des autres grands risques sont aussi les inondations avec le lac et la Thièle. Ce sont des vrais risques après, il y a des risques plus lointains comme les incendies de forêts. Ce qui n’arrive jamais en Suisse mais typiquement au Jura après une grande sècheresse, une forêt de sapins peut bien prendre. Donc, il faut voir comment gérer tout ça et mettre les moyens à disposition.
Le Y-Park a-t-il des impacts sur la ville d’Yverdon ?
Le Y-Park est une longue histoire, il a 30 ans. L’autoroute était censée passer à cet endroit-là mais le projet a évolué différemment et on s’est retrouvés avec ces terrains-là. L’État de Vaud et la commune d’ Yverdon se sont dit qu’ils pouvaient faire un parc technologique et il n’a pas tout de suite fonctionné. Il y a des moments où il marche bien et d’autres où il ne bouge pas. Dans les années 2000, il a commencé à bien marcher jusque en 2008 avec la crise financière où ça n’a plus marché pendant 7-8 ans puis, il y a 4-5 ans, c’est reparti à fond. C’est très intéressant, il y a environ 2’000 emplois là-bas mais c’est à comparer avec les 20’000 emplois de la ville d’Yverdon. On en parle beaucoup mais il y a pleins d’autres endroits qui sont très dynamiques comme gare-lac, autour de la HEIG-VD, etc. Donc, Y-Park ça amène des choses mais ça n’éclipse pas le reste.
Quelle est l’ambiance générale entre les différents partis de la municipalité ?
Ce qui est intéressant avec la municipalité c’est que c’est une équipe mais ce n’est pas vous qui la constituez, c’est la population yverdonnoise. On fait une liste et les gens en face font aussi une liste et puis les gens choisissent dans les deux listes. Il faut ensuite s’entendre même si on ne l’a pas choisi. Avec les personnes sur sa liste, oui, mais les autres non. Le but est donc d’être assez “adulte” pour faire la part des choses. Le mercredi matin on se retrouve tous et on prend énormément de petites décisions, des centaines. Sur une législature de 5 ans, on prend facilement 10’000-20’000 décisions. Il y a des décisions sur lesquelles on travaille vraiment ensemble et environ 10 fois par année, on a un vrai sujet: typiquement le parking de la place d’Armes qui est un vrai sujet sur lequel on n’arrive pas à se mettre d’accord. Ensuite, c’est comment on gère ça. C’est comment on laisse un peu de liberté à ceux qui ne sont pas d’accord pour pouvoir affirmer le fait que on n’a pas pu influencer la décision et faire attention à respecter les gens. Car la semaine suivante il faut se remettre d’accord pour de nouvelles petites choses qui sont très importantes aussi comme par exemple les représentations le soir.
Quelles sont les caractéristiques de votre parti et pourquoi y êtes-vous entré ?
Le parti socialiste est un parti qui est assez collectif donc l’idée est de défendre les personnes qui n’ont pas le pouvoir. Autrefois, c’était les ouvriers, les employés, par exemple. C’est donc un parti profondément ancré dans la notion de solidarité. Il y a des personnes qui ont eu de la chance, dont moi, qui payent relativement cher des impôts pour que des personnes qui ont eu moins de chance aient une vie digne dans le travail, dans la retraite ou dans l’égalité. En politique, on dit toujours la gauche et la droite. La droite met l’action sur la liberté individuelle plus que sur la solidarité et la gauche met plus l’action sur la solidarité. Cela ne veut pas dire que nous pensons que la liberté individuelle n’est pas importante mais, nous pouvons un tout petit peu perdre cette liberté au sens de la solidarité. Ensuite, nous avons les Verts qui viennent eux “attention à la planète, à la biosphère”.
Quelle est à votre avis la plus grande qualité de la politique Suisse ?
La recherche du consensus et du compromis. Il y a plusieurs choses. Premièrement, ce n’est pas individuel. J’ai beau être syndic, j’ai une co-syndic puis on a une municipalité à sept. Si j’ai quatre collègues qui sont d’accord sur un sujet et je suis contre, c’est leurs avis qui s’imposent. Ce n’est pas comme en France où un maire est pratiquement tout puissant. Je trouve ça très bien. Dès qu’on vous donne un peu de pouvoir on vous met toute une série des chaînes et des bâtons dans les roues pour être sûr que vous n’abusiez pas du pouvoir. C’est un système vraiment génial. Moi, je suis dans la commune mais, il y a aussi le canton et la Confédération où ils sont aussi sept, ils se partagent aussi le pouvoir. Je pense que c’est une des recettes du miracle même si ça rend tout extrêmement long et compliqué. Même si pendant le Covid, on ne s’en ai pas plus mal sortis que d’autres, mais à voir. Mais au quotidien, c’est vraiment un super système. Deuxièmement, toutes les différentes parties où il faut trouver le compromis. On a nos envies, ils ont leurs envies et ce ne sont pas les mêmes. On trouve donc une voie médiane et il faut vivre avec. On s’en sort plutôt bien.
Quels sont les thématiques qui vous tiennent le plus à cœur et en-t-il changé au cours de votre vie ?
Avant, j’avais des idées. Il y a plusieurs choses. J’ai fait beaucoup de politique dans l’idée où il faut être ouvert sur l’étranger. Je pense que la Suisse a énormément gagné comme pays d’être ouvert sur l’étranger et elle devrait aussi l’être plus. Je pense qu’elle devrait être membre de l’union européenne et je le pense depuis toujours. Je pense qu’on devrait être plus ouverts avec les immigrés. On est dans une ville où il y a 40% de la population d’origine étrangère. Le pays a gagné beaucoup en étant ouvert et on gagnera beaucoup.
Je pense qu’on devrait être membre de l’union européenne et pas seulement pour prendre et avoir des avantages comme Schengen par exemple mais, on a aussi pleins de choses à amener comme la manière dont on partage le pouvoir. Moi, j’ai le secrétariat général et les finances et j’ai un peu perdu mes grands objectifs à long terme d’entrer dans tout ça. Je suis beaucoup dans les chiffres, combien d’argent on a et où on le met. Je me bats donc essentiellement pour trouver des financements et aller chercher des sous pour permettre la végétalisation, de développer le chauffage à distance et les transports publics.